Si les antalgiques opioïdes de palier II sont des alliés précieux pour soulager les douleurs modérées à sévères, leur usage n’est pas sans risque. En France, les hospitalisations pour intoxication aux opioïdes augmentent chaque année, et les cas de dépendance ou de surdosage inquiètent. Les pharmaciens, en tant qu’acteurs de santé de proximité, sont en première ligne pour accompagner les patients et prévenir ces dérives. Mais comment ces nouveaux entretiens pharmaceutiques peuvent-ils renforcer leur rôle dans la prise en charge des traitements opioïdes ?
- Quels sont les antalgiques opioïdes de palier II ?
- Pourquoi des entretiens spécifiques sur les opioïdes ?
- Qui est concerné par les entretiens opioïdes ?
- En pratique : comment se déroulent ces entretiens ?
- Rémunération et intégration au quotidien
- Un rôle à nouveau renforcé pour le pharmacien
Quels sont les antalgiques opioïdes de palier II ?
Les antalgiques opioïdes de palier II regroupent plusieurs médicaments utilisés pour traiter des douleurs modérées à intenses, lorsque les antalgiques de palier I (comme le paracétamol ou les anti-inflammatoires non stéroïdiens) ne suffisent pas. Ces médicaments incluent :
- Le tramadol : un opioïde très prescrit, parfois en association avec le paracétamol, mais pouvant entraîner des effets indésirables comme la somnolence ou des troubles digestifs.
- La codéine : souvent combinée à d’autres substances comme le paracétamol, elle est également connue pour le risque associé de dépendance.
- La poudre d’opium : utilisée dans certains traitements combinés, elle agit efficacement sur les douleurs mais doit être surveillée de près, notamment en raison de ses effets secondaires.
- La dihydrocodéine : moins fréquente, indiquée pour des douleurs plus sévères.
Ces médicaments doivent être prescrits avec précaution, car leur usage prolongé ou inapproprié peut entraîner des complications importantes, notamment la dépendance ou des effets secondaires graves. À partir du 1ᵉʳ mars 2025, les conditions de prescription et de délivrance du tramadol et de la codéine vont être restreintes, avec la nécessité d’une ordonnance sécurisée et une durée de traitement maximale de trois mois.
Pourquoi des entretiens spécifiques sur les opioïdes ?
Malgré leur efficacité, ces médicaments présentent un risque élevé de dépendance, en particulier en cas d’utilisation prolongée ou inadaptée. Les nouveaux entretiens pharmaceutiques, encadrés par l’avenant à la convention nationale des pharmaciens, ont été conçus pour :
- informer et éduquer les patients sur ces risques ;
- optimiser l’usage des traitements ;
- favoriser un suivi régulier de la douleur et des traitements antalgiques.
Qui est concerné par les entretiens opioïdes ?
Les patients éligibles aux entretiens opioïdes sont les patients ayant une prescription d'antalgique de palier II de plus d'un mois. L'entretien doit être réalisé lors du premier renouvellement du traitement (c'est-à-dire lors de la seconde délivrance). À noter qu'un seul entretien n'est possible par patient sur une durée de 12 mois.
En pratique : comment se déroulent ces entretiens ?
Dès la deuxième délivrance d’un traitement par opioïdes de palier II, le pharmacien peut proposer un entretien au patient. Cet échange, structurant et bienveillant, repose sur plusieurs étapes clés :
- Rappel des principes de bon usage : respect des posologies, durée maximale de traitement, risques d’automédication ou d’associations médicamenteuses.
- Identification des signes de risque : utilisation du questionnaire POMI (Prescription Opioid Misuse Index) pour déceler un usage inapproprié.
- Éducation sur les effets indésirables : constipation, somnolence, troubles cognitifs, dépendance.
- Suivi individualisé : conseil adapté à la situation du patient et, en cas de suspicion de problème, contact avec le médecin prescripteur via une messagerie sécurisée.
Rémunération et intégration au quotidien
Ces entretiens sont valorisés à hauteur de 5 € TTC, pris en charge à 70 % par l’Assurance Maladie. La facturation s’effectue sous le code acte « EPA » et est indépendante des autres prestations. Pour intégrer ces entretiens sans perturber le flux de travail, il est essentiel d’anticiper :
- prévoir des plages horaires dédiées ;
- sensibiliser l’équipe officinale ;
- communiquer auprès des patients.
Un rôle à nouveau renforcé pour le pharmacien
Au-delà de la simple dispensation, ces entretiens permettent au pharmacien de se positionner en tant qu’acteur du parcours de soins. En évaluant le risque de dépendance ou de surdosage, en éduquant sur les bons usages et en assurant un suivi rapproché, le pharmacien contribue directement à l’accompagnement du patient douloureux chronique et à la prévention des complications liées aux opioïdes.
Entre 2017 et 2021, on constatait une hausse de 25% de la prescription de certaines opioïdes. Avec l’augmentation de la consommation des opioïdes et des problématiques associées, ces entretiens pharmaceutiques représentent une avancée majeure. Ils renforcent la qualité de vie des patients sous traitement. Une belle opportunité pour l’officine de s’engager encore davantage au service de la santé publique.
Cet article a été validé par des professionnels de santé et vérifié par des sources sûres au moment de sa publication. Il ne prétend cependant pas à l’exhaustivité des informations fournies. Le présent article n’a qu’un but informatif et ne remplace pas une formation ou un conseil médical.
Source :
https://pharmaprat.fr/fiches_pratiques/entretien-antalgique-de-palier-ii/