Le déploiement du BSI, qui s’inscrit dans le cadre des avenants 6, 8 et 10, vise à renforcer la qualité des soins et l’efficience du système de santé. Il vient directement remplacer la Démarche de Soins Infirmiers (DSI) et s’applique à nous tous, infirmiers libéraux (IDEL), lorsque nous travaillons avec des personnes âgées ou handicapées. Il permet notamment de définir un plan de soins personnalisé, adapté aux besoins et à l’autonomie de chaque patient. Mais encore faut-il être au courant des changements et de la généralisation du BSI ! Une mise à jour sur ces sujets est donc obligatoire avant le 3 janvier 2024, d'où l'importance pour les IDEL de suivre une formation BSI. Concrètement, comment ça va se passer ? On vous explique tout !
Quel déploiement pour le BSI ?
Depuis le 3 octobre 2023, le BSI est généralisé à toute la population dépendante nécessitant des soins infirmiers. Si vous aviez déjà des patients sous BSI forfaitaire, pas de changement : vous continuez jusqu’à la date de renouvellement, après un an.
En revanche, si vous avez des patients de moins de 85 ans sous BSI facturé en AIS, vous devez passer au BSI forfaitaire avant janvier 2024. Pour cela, deux possibilités :
- Si le BSI actuel se termine avant fin 2023, vous facturez en AIS jusqu’au bout, puis vous faites un nouveau BSI.
- Si le BSI actuel se prolonge au-delà de janvier 2024, vous devez faire un BSI intermédiaire avant cette date.
Pour tout nouveaux patients que vous prenez en charge depuis le 3 octobre, AmeliPro vous propose directement un BSI forfaitaire.
Généralisation du BSI : une obligation pour tous les patients dépendants
La dépendance n’est pas seulement un concept, elle revêt avant toute chose un enjeu politique, organisationnel et systémique.
Dépendance : une définition en « miroir déformant »
Le concept d’autonomie admet à la fois une dimension psychique et une dimension intellectuelle. C’est choisir pour soi-même, même si on n’est pas toujours capable de réaliser ses choix.
En revanche, la dépendance désigne l’incapacité d’une personne à réaliser des activités (physiques, psychiques, sociales, etc.) sans aide extérieure.
Alors que la Caisse Nationale de Solidarité pour l’Autonomie (CNSA) se concentre sur la notion d’autonomie au sens strict, l’Union Nationale des Caisses d’Assurance Maladie (UNCAM), grâce à la NGAP, offre un système de prise en charge plus large incluant la dépendance.
Prise en charge institutionnelle de la perte d’autonomie
La CNSA, en charge de l’autonomie, accompagne trois publics : les personnes âgées, les personnes handicapées et les aidants. La généralisation du BSI ouvre des perspectives en termes de population, les personnes handicapées étant plus nombreuses que les personnes âgées en France. Le BSI vient donc directement élargir notre clientèle.
Dépendance et soins infirmiers
En tant qu’infirmiers libéraux, nous sommes tous régis par le Code de la Santé Publique. Notre profession est définie par des critères réglementaires et conceptuels stricts. Dans notre Démarche de Soins Infirmiers (DSI), la dépendance est une notion clé, inspirée par Virginia Anderson. Cette notion englobe deux aspects : la dépendance et l’indépendance.
L’indépendance, selon Anderson, c’est la capacité à répondre à ses besoins fondamentaux, avec ou sans aide. Cette aide peut être humaine ou technique, comme un médicament ou un déambulateur. En simplifiant, on pourrait dire que l’indépendance d’Anderson correspond à notre définition française de l’autonomie.
BSI : les 8 questions clés à se poser pour sa mise en œuvre
Le BSI, ou Bilan de Soins Infirmiers, est désormais un outil clé pour les infirmiers libéraux, et s’inscrit directement dans l’amélioration de notre système de santé. Il facilite la prise en charge des patients dépendants et contribue à l’autonomie de la profession infirmière. C’est une avancée précieuse pour nous, IDEL, notamment dans le cadre du maintien à domicile des personnes âgées.
1. Est-ce que les interventions que je dois réaliser chez ce patient existent déjà dans la nomenclature ?
Si vous avez des actes à effectuer qui sont déjà classés en AMI dans la nomenclature, alors le BSI n’est pas nécessaire.
Prenons un exemple concret : vous devez administrer un traitement à des patients atteints de troubles psychiatriques et cognitifs. Faut-il faire un BSI ? Non, si c’est la seule intervention. Car cet acte existe déjà dans la nomenclature et doit être respecté. Le BSI ne remplace pas les actes préexistants.
2. Suis-je le bon professionnel pour répondre aux besoins en suppléance dans la dimension des besoins fondamentaux ?
Notre pays dispose d’un système de santé bien organisé, avec des professionnels dédiés comme les aides-soignants et les auxiliaires de vie.
Notre rôle est de coordonner ces acteurs, et non de les remplacer. Si certains actes sont dans nos compétences, cela ne signifie pas toujours qu’ils sont remboursables par la Sécurité sociale.
Mieux vaut alors se questionner : Est-ce à nous de le faire ? Ne pouvons-nous pas confier cet acte à quelqu’un d’autre ? La première partie du BSI admet d’ailleurs une question sur les aidants professionnels dans l’environnement du patient.
Le BSI doit être utilisé uniquement lorsque la dépendance du patient nécessite des actes qui relève de notre rôle propre (Art R4311-5 du Code de Santé Publique).
3. Ma démarche clinique est-elle conforme ?
Si certains sont tentés de penser « Je commence le soin, et je fais le BSI dans un second temps », c’est une erreur ! Selon le Code de la Santé Publique, l’infirmière doit d’abord recueillir les données, identifier les besoins,poser le diagnostic infirmier, et ensuite seulement, planifier et réaliser les actes. Il n’est pas correct de commencer une prise en charge sans avoir fait ce travail préliminaire.
En plus de l’aspect réglementaire, l’enjeu est aussi administratif. Sans raisonnement clinique et sans BSI envoyé au médecin traitant, nous ne serons pas en mesure de facturer. Par exemple, si vous commencez les actes et décidez ensuite, trois semaines après, de faire le BSI, vous risquez de générer de l’indu. Pour une meilleure gestion des risques, respectez cette conformité.
4. Le besoin en suppléance est-il ponctuel ou pérenne ?
Qu’il s’agisse d’une personne âgée ou handicapée, la dépendance est là 24/7. Prenons l’exemple d’une personne opérée de l’épaule : jeune et en pleine forme, elle devient dépendante le temps de sa convalescence. Le besoin est alors motivé par le fait qu’il y a nécessité de manipuler le dispositif d’immobilisation (rôle IDE). Cependant, cette demande est provisoire, pour un laps de temps court (un mois). Dans ce cas, vous devez quand même réaliser un BSI (sur prescription médicale). Ce dernier sera valable un an mais vous ne l’utiliserez que le temps nécessaire. A la fin de cette prise en charge, vous devrez cesser la facturation et pourrez archiver le BSI sur AmeliPro.
5. Le nombre d’interventions à réaliser justifie-t-il la réalisation d’un BSI ?
Parfois, une seule intervention journalière suffit.
Mais attention, dans le cas des bas de contention, désormais inclus dans le BSI, si c’est la seule chose que vous avez à faire, l’utilisation du BSI n’est pas justifiée. En effet, le BSI ne permet pas de coter des actions n’existant pas à la NGAP.
La dépendance a des conséquences directes sur plusieurs aspects de la vie quotidienne. Mais attention à ne pas avoir des BSI « trop pauvres ». Il y aura des contrôles !
Si vous pouvez justifier qu’une infirmière passe le matin et une aide-soignante le soir, vous pourrez justifier l a réalisation d’un BSI. Mais il faudra que ce soit écrit. Vous pouvez aussi utiliser les parties de textes libres pour expliquer le contexte de votre action. Attention cependant : ne cochez dans le BSI que les actions que vous avez réalisées en propre.
6. Les interventions à cocher sont-elles celles que je réalise réellement ?
Dans le cadre du BSI, il est impératif de ne cocher que les interventions que vous effectuez personnellement. Si vous déléguez certaines tâches à des tiers, comme les aidants ou les aides-soignants, ces interventions ne doivent pas être cochées.
Par ailleurs, pour certains domaines d’intervention, les actions peuvent être réalisées par d’autres professionnels de santé. Dans ce cas-là, vous devez cocher uniquement les actions basées sur la coordination et la surveillance. D’ailleurs, cette précision peut parfois réduire le nombre d’interventions dans votre BSI. Alors, restez vigilant !
7. Ma traçabilité est-elle conforme ?
Depuis la loi Kouchner de 2002, tous les actes doivent être tracés. Que ce soit une simple fiche ou un diagramme de soins, la traçabilité est obligatoire.
Le Code civil français stipule que ce qui n’est pas écrit n’est pas fait. S’il est parfois difficile d’argumenter à l’écrit, le « sans écrits » est indéfendable pour autant en cas de contrôle.
Par exemple, si vous cochez « surveillance de l’alimentation » pour un BSI d’un an, n’oubliez pas que cela se fait bien pendant un an, et pas seulement pendant 15 jours ! Assurez-vous d’avoir des fiches de traçabilité et des outils appropriés, car cette traçabilité vous sera demandée.
8. Dois-je anticiper le renouvellement de mon BSI ?
Ne vous laissez pas surprendre à la dernière minute. Si vous dépassez les dates de renouvellement, la Sécu ne manquera pas de vous rappeler que la prise en charge n’est pas couverte. C’était déjà le cas avec la DSI, et le BSI ne fait pas exception. Un seul mot d’ordre : anticipez ! Vous pourrez compter sur le soutien d’AmeliPro, qui vous enverra un message 3 semaines avant la fin de validité d’un BSI.
Pour cette année d’ailleurs, pensez à renouveler vos BSI avant les fêtes. Le 1er janvier ne sera probablement pas la date idéale pour un renouvellement !
Le BSI n’est pas un outil avec lequel vous pouvez improviser. Sa traçabilité est cruciale, et la connaissance des bonnes pratiques est majeure, tant sur le plan règlementaire que légal. Le BSI permet de noter des éléments de risque ou des situations complexes en champ libre, que vous pourrez présenter aisément en cas de problème, de contrôle ou de contentieux pour apporter la preuve de votre suivi. N’oubliez pas de récupérer votre PDF de synthèse sur AmeliPro à la fin du BSI et conservez-le précieusement pour assurer la continuité des soins.
Et n’oublions pas un point important : au-delà d’un outil administratif obligatoire, le BSI, bien utilisé, peut se révéler un outil intéressant et puissant qui nous permet de valoriser notre rôle propre en rendant visible tout ce qui peut paraitre invisible.
Cet article a été validé par des professionnels de santé et vérifié par des sources sûres au moment de sa publication. Il ne prétend cependant pas à l’exhaustivité des informations fournies. Le présent article n’a qu’un but informatif et ne remplace pas une formation ou un conseil médical.